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Covid-19 en Algérie : « Attention ! les chiffres commencent à grimper »

Covid-19 en Algérie : « Attention ! les chiffres commencent à grimper »

Le Pr Rachid Belhadj, directeur des activités médicales et paramédicales au CHU Mustapha d’Alger fait part d’une hausse des contaminations au covid au sein des personnels de cet établissement. Il appelle à redoubler de vigilance en appliquant les mesures barrières surtout durant cette période d’été propices aux rassemblements festifs.

L’Algérie a franchi de nouveau la barre des 300 cas positifs de covid-19 par jour. Au CHU Mustapha, avez-vous constaté cette augmentation ?

Effectivement juste après l’Aïd, notre appréhension était de voir les citoyens ne pas respecter les conditions sanitaires et les mesures préconisées pour lutter contre le covid-19.

Nous redoutions le début d’une autre vague d’un virus qui n’est pas connu. Depuis une semaine, nous avons constaté hélas que nos chiffres au CHU Mustapha ont été multipliés par trois.

On est passé de 4 à 5 nouveaux cas avec une à deux demandes d’hospitalisations, à 24 nouveaux cas dont six hospitalisations. Le chiffre a été multiplié presque par quatre. Et ce n’est qu’un début.

Ce que nous avons constaté aussi, c’est que souvent ce sont des formes familiales qui confirment l’hypothèse de l’Aïd. Autre caractéristique : cette forme de contamination est beaucoup plus rapide ; elle ne donne pas de chance à quelqu’un qui n’a pas respecté les mesures barrières qui est vite contaminé.

Chez nous, ce sont presque tous les services qui sont touchés avec une augmentation du nombre de cas de soignants contaminés, en moyenne 3 à 4 personnes par service. Et le premier qui a été contaminé s’est passé en milieu familial. C’est pourquoi, je demande aussi au personnel de la santé de renforcer les mesures barrières puisque le covid est toujours-là.

Personnels de la santé, « s’il vous plaît, vaccinez-vous ! » 

Quel est le constat en matière d’occupation des lits de réanimation ?

Nous avons constaté un forte demande en lits de réanimation. Jusqu’à aujourd’hui, nous avons 54 personnes hospitalisées au CHU Mustapha. Nous avons 13 personnes en réanimation dont deux sont placées sous ventilation respiratoire.

Par contre, le nombre de décès n’a pas augmenté. Nous avons aussi remarqué qu’il y a de plus en plus de sujets jeunes. C’est un rappel aux personnels de la santé « s’il vous plaît, vaccinez-vous ! ».

Il y a une certaine phobie d’un certain vaccin, avec une préférence d’un certain autre mais hélas il n’est pas encore disponible pour des raisons qui dépassent notre pays.

Aussi, nous recommandons aux personnes de plus de 55 ans qui ont des maladies de se faire vacciner. Au CHU Mustapha, nous n’avons vacciné que 17 % parmi notre personnel. Or, ce n’est pas normal, cela veut dire que l’on s’expose au risque de contaminations.

Quelle évaluation faîtes-vous de la campagne de vaccination en Algérie ?

Si on la compare aux autres campagnes qui ont lieu dans d’autres pays, en Algérie on est très loin. Maintenant que la campagne a été lancée, elle n’a pas encore connu une vitesse de croisière satisfaisante.

Cela à cause du manque de campagne de sensibilisation et de la non disponibilité du produit, deux éléments ajoutés à l’effet toxique des médias qui font que beaucoup de gens ont pris peur surtout avec l’affaire autour du vaccin d’AstraZeneca.

Il y a une réticence non seulement en milieu hospitalier mais aussi au sein de la population. J’espère que devant le risque sanitaire qui est encore présent et l’arrivée de l’été, les personnes âgées diabétiques et/ou hypertendues et celles qui ont des pathologies chroniques importantes feront attention : le virus est encore là et les chiffres commencent à grimper.

Je recommande aux familles algériennes de ne pas organiser les fêtes de mariages collectifs, on peut les organiser à minima avec moins de convives. On a vu que des gens sont morts à cause de cette contamination en milieu familial, notamment durant les fêtes.

Aux conditions estivales difficiles, si l’on ne respecte pas les mesures barrières et que l’on ne se vaccine pas, on réunira tous les ingrédients d’une 3e vague.

La vigilance doit-elle être plus importante avec la réouverture partielle des frontières ?

On ne va pas porter le risque (importation des variants) sur notre communauté nationale à l’étranger, mais bien sûr il y a des mesures sanitaires à respecter et qui sont pratiquées dans de nombreux pays.

Ce qui nous pose problème c’est cette période de confinement. Cinq jours c’est quand même astreignant. Il y a aussi les conditions de voyages, je pense que les personnes âgées atteintes de maladies ne vont pas supporter. Nous exhortons nos concitoyens à être patients et responsables pour éviter le chaos sanitaire et aussi cette anarchie sociale.

En votre qualité de directeur des activités médicales et paramédicales au CHU Mustapha, ne pensez-vous pas qu’on a donné plus d’importance au covid au détriment des autres maladies ?

Il y a des malades qui décèdent de pathologies métaboliques, les cardiopathes, les hypertendus, les diabétiques et les insuffisants rénaux.

Malheureusement, covid + problème rénale, covid + problème cardiaque…ça ne pourra qu’aggraver la situation. C’est pourquoi, il y a une démarche à respecter.

Au CHU Mustapha, nous avons dédié une aile spéciale pour les malades chroniques notamment, c’est ce qui nous inquiète actuellement, les AVC chez les hypertendus et surtout chez les sujets jeunes.

Il faut les prendre en charge et leur donner une chance pour ne pas être infecté en milieu hospitalier…Donc, beaucoup d’organisation, de sagesse et d’éthique et de déontologie, il faut rester vigilants ; nous devons gérer nos congés et notre personnel de santé toutes catégories confondues, il faut qu’il y ait des personnels présents en première ligne 24 h/24 et 7 j/7 pour faire face à toutes les situations possibles.

Nous avons créé notre propre SAMU interne et recruté 15 médecins que nous sommes en train de former pour essayer de prendre en charge efficacement l’urgence médicale.

Le problème du consommable se pose-t-il toujours ?

Il ne se pose plus. Il y a des nationaux qui fabriquent notamment des masques aux normes internationales. Nous sommes en train de renforcer notre stock en combinaisons adaptées à la période d’été.

Quid des interventions chirurgicales ?

Elles se passent normalement et nous avons ouvert tous nos services de chirurgie qui fonctionne 24 h/24.

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