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« État hors-la-loi » : le Maroc a coché la dernière case  

« État hors-la-loi » : le Maroc a coché la dernière case  

La violente répression qui a frappé les migrants subsahariens à la frontière avec Melilla a terni davantage l’image du Maroc.

Au moins 23 migrants, selon les autorités marocaines, 37 d’après des ONG, ont trouvé la mort vendredi 24 juin en tentant d’entrer dans l’enclave espagnole, située au nord du royaume.

L’Algérie, par la voix de son envoyé spécial chargé du Sahara occidental et des pays du Maghreb, Amar Belani, a dénoncé dimanche 26 juin un « carnage » qui a révélé au monde entier le vrai visage du régime marocain.

« Ces événements tragiques mettent en relief la violation systématique des droits humains de la part d’un État qui a choisi, d’une part, d’instrumentaliser l’épouvantail de la submersion migratoire à des fins de chantage politique et d’autre part, de jouer le rôle de gendarme -contre espèces sonnantes et trébuchantes-  dans le cadre de l’externalisation de la gestion des frontières extérieures de l’Union européenne », a assené Amar Belani.

La police marocaine a fait un usage disproportionné de la force. Le nombre élevé de victimes et le traitement dégradant réservé aux rescapés ont choqué le monde entier.

Malgré les dénégations du Maroc qui a tenté de faire croire que les victimes sont mortes en tombant du haut de la barrière grillagée, la désapprobation internationale est unanime, hormis le gouvernement espagnol qui s’est vu rangé du côté de son nouvel allié.

Des appels à une enquête indépendante et impartiale émanent notamment d’ONG mais aussi de l’Union africaine et des Nations unies.

Ce qui s’est passé le 24 juin est un coup terrible pour l’image du royaume, déjà pas très reluisante en matière de respect des droits de l’homme et de la légalité internationale.

En interne, et malgré un multipartisme de façade, les principaux leviers tant politiques qu’économiques restent aux mains de la famille royale et de son entourage, et les atteintes aux droits des voix dissidentes sont récurrentes. Mais c’est sur le plan international que ses entorses au droit sont plus visibles.

Sur la question du Sahara occidental, que le Maroc occupe illégalement depuis près d’un demi-siècle, le régime marocain s’entête à refuser de se conformer à la légalité internationale et à appliquer les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité des Nations unies.

Le référendum d’autodétermination que l’ONU a retenu comme l’unique voie juste pour le règlement du conflit, n’a pas eu lieu à cause du recul du royaume sur ses engagements pris lors des accords de cessez-le-feu de 1991.

Dans le même territoire, outre les atteintes quotidiennes aux droits des Sahraouis, les forces d’occupation se sont mises depuis quelque temps à bombarder des convois de commerçants en route pour la Mauritanie.

Le 1er novembre dernier, trois camionneurs algériens ont trouvé la mort sous le feu de l’aviation marocaine à la frontière entre la Mauritanie et le Sahara occidental.

Avec l’Algérie justement, le Maroc multiplie depuis quelques années les « actes hostiles » qui ont atteint leur paroxysme l’été dernier, provoquant la rupture des relations entre les deux pays.

Avant d’en arriver à cette mesure extrême, l’Algérie avait beaucoup supporté. De l’inondation de ses frontières de cannabis à l’appel à la partition de son territoire, en passant par l’introduction d’Israël dans la région et l’espionnage de ses responsables et de ses citoyens. La liste est longue.

La dernière illusion

Le scandale Pegasus, du nom d’un logiciel espion israélien, a éclaté à l’été 2021. Selon les révélations d’ONG et de médias internationaux, des milliers de téléphones portables ont été mis sur écoute par les services marocains, dont beaucoup appartenant à des citoyens et dirigeants algériens, et certains à de très hauts responsables étrangers, comme le président français Emmanuel Macron.

La France est censée être l’allié du Maroc, mais cet épisode a démontré le peu de cas que fait le royaume de l’amitié, de la légalité et de l’éthique.

Avec l’Espagne, c’est au chantage aux flux migratoire que ce pays a eu recours pour lui forcer la main sur le dossier sahraoui. En mai 2021, sa police a laissé plus de 10 000 migrants entrer d’un coup fait l’enclave de Ceuta, en représailles à l’hospitalisation en Espagne du chef du Polisario, Brahim Ghali.

Un appel d’air aux migrants subsahariens qui a débouché sur le drame de Melilla. Au lieu de reconnaître son erreur, le Maroc a voulu se dérober en désignant l’Algérie comme étant responsable de l’afflux de migrants, chose qu’elle n’a pas faite lors des épisodes de juin 2021 et mars 2022, quand des candidats à l’émigration clandestine en Espagne avaient pris d’assaut les enclaves espagnoles.

Bien qu’il soit la dernière puissance occupante en Afrique, le Maroc se targuait d’être le chantre de l’Africanité, en ouvrant des succursales à travers le continent et des lignes aériennes, et en régularisant les migrants subsahariens.

Mais l’illusion a volé en éclats après le carnage de Melilla. Le monde a connu plusieurs crises migratoires ces dernières années (Grèce, Turquie, Allemagne, Pologne et autres pays de l’Europe de l’est), mais aucun de ces États ne s’est permis un tel usage disproportionné de la force.

Occupation illégale, agression, espionnage même de ses alliés, chantage migratoire et enfin répression féroce des migrants. Avec ce qui s’est passé en ce mois de juin 2022 aux portes de Melilla, le Maroc aura coché toutes les cases d’un État hors-la-loi.

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