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Pourquoi la visite de Tebboune suscite des réactions hostiles au Maroc

Pourquoi la visite de Tebboune suscite des réactions hostiles au Maroc

Le président Abdelmadjid Tebboune clôture ce mercredi 24 mai une visite d’Etat de trois jours au Portugal entamée lundi, d’où il a lancé de nombreux messages.

Une visite à enjeux multiples dans le contexte mondial et régional actuel qui suscite des réactions hostiles au Maroc où elle est suivie avec un intérêt particulier de la part des médias.

La visite du président algérien au Portugal était peut-être prévue de longue date, mais ce n’est qu’à la dernière minute qu’elle a été annoncée.

Ces derniers mois, la presse et la communication officielle ont plutôt évoqué régulièrement les visites programmées du président à Paris et Moscou. Cette visite au Portugal était complètement inattendue pour l’opinion publique et les observateurs.

La visite traduit la nouvelle stratégie de la diplomatie algérienne, qui est de privilégier le renforcement du partenariat avec les pays qui entretiennent de bonnes relations politiques avec l’Algérie et de mettre les atouts économiques du pays au service d’une plus grande influence politique et stratégique.

Cela a été notamment le cas avec l’Italie avec laquelle il y a eu un échange de visites de haut niveau depuis 2021, une multiplication des investissements italiens en Algérie et des contrats supplémentaires de production et de fourniture de gaz.

Le niveau du partenariat économique avec l’Italie est plusieurs crans au-dessus, mais les relations politiques de l’Algérie avec le Portugal ont toujours été également bonnes.

Elles sont aussi ancrées dans l’histoire. A plusieurs reprises, le président Tebboune a rappelé le soutien de l’Algérie indépendante à l’opposition démocratique à la dictature portugaise dans les années 1960 et au début des années 1970.

Une forte délégation d’opérateurs économiques algériens a accompagné Tebboune à Lisbonne et des annonces ont été faites de part et d’autre pour un renforcement significatif du partenariat entre les deux pays.

Cette visite à Lisbonne survient dans un contexte de crise entre l’Algérie et l’Espagne, voisin immédiat du Portugal.

Si rien ne va aujourd’hui avec Madrid, c’est à cause du revirement historique du gouvernement de Pedro Sanchez sur la question du Sahara occidental en mars 2022.

L’Algérie a depuis procédé à la suspension du traité d’amitié et de bon voisinage et les échanges commerciaux hors hydrocarbures entre les deux pays. Les pertes engendrées par ces mesures pour les entreprises espagnoles sont colossales.

Visite de Tebboune au Portugal : un « cauchemar » pour le Makhzen

Lorsque les pays de la rive sud de la Méditerranée ont sollicité de l’Algérie d’augmenter ses flux de gaz, après le déclenchement de la guerre en Ukraine, Alger avait clairement exprimé sa préférence pour l’Italie au détriment de l’Espagne, et c’est ce qui a été fait.

A Lisbonne, le président Tebboune et son homologue portugais Marcelo Rebelo de Sousa ont réaffirmé leur attachement au traité d’amitié qui lie les deux pays depuis 2005.

Le sens du message ne peut pas échapper à Madrid où la pression va crescendo sur le gouvernement de Pedro Sanchez pour l’amener à « réparer » les dégâts qu’il a occasionnés à la relation avec un partenaire important.

Comme lors des visites échangées avec l’Italie, les responsables algériens et portugais ont mis l’accent sur la « convergence de vues » sur les questions de politique internationale dont celle, importante pour toute la région, du Sahara occidental.

Le président de Sousa a rappelé la position « constante » de son pays qui est de soutenir « le rôle des Nations Unies et leurs résolutions vis-à-vis de la question du Sahara occidental » et d’œuvrer  à « réaliser les principes de la démocratie en la matière ».

Le Portugal reste donc loin de la ligne adoptée par l’Espagne sur le Sahara occidental et qui a poussé l’Algérie à geler le traité d’amitié avec ce pays.

Si, à Madrid, cette visite du président algérien peut accroître les regrets, à Rabat, elle fait fulminer.

Elle constitue une démonstration supplémentaire des trajectoires opposées prises par l’influence algérienne et marocaine sur la scène internationale ces derniers mois, d’où toutes ces réactions hostiles qu’elle suscite dans la presse marocaine qui tente de donner une autre dimension à une vidéo montrant deux ou trois personnes en train de tenter de chahuter la visite. À Alger, on soupçonne la main du Maroc.

« Ce sont des mercenaires marocains qui ont tenté en vain de chahuter la visite du président Tebboune au Portugal. Tout s’est très bien déroulé », affirment nos sources.

Il est aussi curieux que les mêmes relais médiatiques diffusent, alors que Tebboune se trouve à Lisbonne, un faux enregistrement dans lequel des propos peu amènes sur l’Algérie sont attribués au président français Emmanuel Macron.

La parodie, de piètre qualité, sent l’amateurisme. La visite de Tebboune au Portugal a suscité en tout cas un intérêt inhabituel dans les médias marocains, et ce n’est pas sans raison.

Ces médias réputés proches du palais royal prennent la précaution de ne pas critiquer le Portugal, mais ils tentent par tous les moyens de diminuer de l’importance de la visite de Tebboune dans ce pays.

Après l’Espagne, la cible du Maroc était le Portugal, qu’il voulait voir emboîter le pas à Madrid sur la question du Sahara occidental. C’est dans cette optique que s’inscrit la visite effectuée il y a deux semaines au Portugal par le Premier ministre marocain Aziz Akhannouch.

Avec l’Espagne, le Maroc a eu recours à un long chantage à la « bombe migratoire » et un marchandage sur les enclaves de Ceuta et Melilla.

Avec Lisbonne, il n’a pas autant de leviers et c’est l’Algérie qui semble avoir actionné les siens, moins bruyants, mais autrement efficaces. En somme, la diplomatie algérienne vient de réussir un coup d’éclat par cette visite de Tebboune au Portugal, qui tourne au cauchemar pour le Maroc.

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