Économie

Rapport de la BM sur l’Algérie : les critiques de Hadj Nacer

Un récent rapport de la Banque mondiale sur la situation économique de l’Algérie a suscité une vive controverse. L’ancien gouverneur de la Banque d’Algérie, Abderrahmane Hadj Nacer, a évoqué la polémique suscitée par ledit rapport et plus globalement le rôle de l’institution ainsi que celui du Fonds monétaire international (FMI), dans une interview accordée à Sputnik News. Comme d’habitude, Hadj Nacer livre un avis tranché et sans équivoque.

L’agence de presse officielle algérienne APS a reproché à l’institution de Bretton Woods de sortir « de son cadre d’institution financière internationale pour se transformer en un outil de manipulation et de propagande », qui distille « des informations tendancieuses et sournoises sur la situation économique en Algérie ».

L’APS a ensuite accusé un cadre de la BM d’avoir rédigé le rapport sous la dictée du Maroc, alors qu’entre-temps, le premier ministre Aïmene Benabderrahmane, a tenté de calmer le jeu, en soulignant les points positifs du rapport.

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La Banque mondiale s’est défendue dans un communiqué rendu public le 6 janvier, dans lequel elle a regretté ces articles qu’elle a qualifiés d’ « inacceptables », et s’est présentée comme étant « une institution internationale de développement composée de pays membres, qui s’est fixé comme double objectif de mettre fin à l’extrême pauvreté et de promouvoir une prospérité partagée ».

Une définition que ne partage pas Abderrahmane Hadj Nacer, ancien gouverneur de la Banque d’Algérie. « Après la réussite dans la reconstruction de l’Europe (après la seconde guerre mondiale), la Banque mondiale est devenue un instrument mondial mais c’était un instrument de domination, dans le sens où l’Occident a conçu le reste du monde comme étant la suite des anciens empires », dit-il, notant que non seulement la BM et le FMI n’ont pas aidé l’Afrique à se développer, mais ces institutions sont devenus des instruments de domination des pays du Sud.

« Il fallait donner l’illusion de l’indépendance et de l’autonomie. La BM était l’instrument de l’illusion pour perpétuer la réalité des rapports néo- coloniaux. (…) Quand le conseil d’administration de la BM ou du FMI se réunit, lorsqu’il s’agit de l’Algérie ou du Congo-Brazzaville, c’est l’administrateur français qui va dicter ce qu’il convient de faire. C’est la perpétuation de l’ordre néocolonial, ce n’est certainement pas d’aider aux financements  innovants ou à la mise en place des financements de projets qui véritablement vont accroître l’indépendance du pays », explique Hadj Nacer.

Evoquant le rapport controversé sur l’Algérie, l’ancien gouverneur de la Banque d’Algérie estime que ces rapports « révèlent les faiblesses des équipes techniques et des équipes politiques et non pas la puissance de la Banque mondiale ou du FMI ».

« Le débat sur le rapport révèle la faiblesse technique des institutions administratives algériennes puisqu’elles sont censées avoir donné leur aval à ce rapport. Donc ceci nous révèle une faiblesse abyssale, c’est que, au minimum, personne n’a lu ce rapport (…) Est-ce que c’est faute de de la Banque mondiale ?, Non,  c’est la faute du pays qui continue à adhérer à un système sans avoir les moyens de se battre par rapport à ce système », tranche Hadj Nacer.

Pour faire face, il faut une élite politique suffisamment légitime, dit-il, estimant que la « délégitimation » a fait des pays du sud, notamment d’Afrique, « des supermarchés où tout le monde vient se servir ».

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