Société

Siham Laadjal, une architecte algérienne qui brille à Paris

Paris est une destination tout indiquée pour qui veut apprendre le métier d’architecte. Il est toutefois plus difficile qu’ailleurs de briller dans ce « grand musée d’architecture à ciel ouvert », surtout pour une architecte algérienne.

Siham Laadjal, jeune architecte algérienne sortie de l’École d’architecture d’Alger (Epau), l’a fait. Elle a pu se faire une place dans le monde très sélectif de l’architecture parisienne. Non sans des efforts continus et des sacrifices de tous les jours.

À 45 ans, elle est à la tête de son propre cabinet parisien, qu’elle a cofondé en 2020 avec une collègue et amie française. « C’est un projet qui concrétise notre amitié franco-algérienne », dit-elle.

Les deux femmes se sont lancées dans l’aventure avec « la boule au ventre », leurs « maigres indemnités de chômage » et leur solide expérience. Après quelques difficultés au démarrage, Koko Architecture est aujourd’hui une entreprise qui se porte plutôt bien, se félicite sa cofondatrice.

« Très vite nous récoltons les fruits de notre persévérance au travail et nos valeurs partagées », dit-elle à TSA.

Ce sont d’abord leurs anciens collègues qui leurs proposent des contrats de sous-traitance sur des projets de logements collectifs ou individuels en France.

Puis petit à petit, l’activité se diversifie : conception de lots de maisons individuelles, des bâtiments de logements collectifs, une résidence de travailleurs, une crèche, rénovation d’appartements, extension de maisons, hôtels particuliers, architecture d’intérieur, design…

Avant d’en arriver là, Siham Laadjal a derrière elle un très long parcours entamé à Biskra, aux portes du Sahara algérien. Bachelière a seulement 16 ans, elle rejoint l’Epau, la prestigieuse école d’architecture d’Alger d’où elle sort avec le diplôme d’architecte à 21 ans.

C’était en 1999. Derrière tout cela, un père, « un grand homme algérien » qui lui a transmis, très jeune, toutes les valeurs qui garantissent le succès. Siham Laadjal lui rend un vibrant hommage : « Il m’a appris les valeurs du travail et de la réussite dans la société, j’ai été très influencée par sa rigueur, sa persévérance et sa réussite en Algérie ».

Bien qu’elle ait obtenu son diplôme avec brio, la jeune femme considérait qu’il est encore trop tôt pour prétendre maîtriser le métier. « Je ressentais encore le besoin d’apprendre pour mieux maîtriser cette discipline », reconnaît-elle.

Et quoi de mieux que d’aller parfaire sa formation à Paris. Son père, encore lui, l’encourage tout en lui assurant que lui et l’Algérie seront toujours là pour l’accueillir à bras ouverts si elle décidait de faire marche-arrière. La question de rester en France ou de retourner au pays se posera d’ailleurs à chacune des étapes clés de ces 25 ans d’exil parisien.

À 21 ans donc, la jeune femme se lance dans une nouvelle aventure, une nouvelle vie. « Loin de ma famille et du confort habituel ».

Siham Laadjal : du sud de l’Algérie aux cabinets d’architecture de Paris

D’abord à l’école d’architecture de Versailles pour entamer l’équivalence de son diplôme obtenu à Alger. « Ce fut une expérience très enrichissante pour moi. Dans cette école, j’ai eu l’occasion d’échanger et d’assister à des cours dispensés par de grands architectes que je ne connaissais qu’à travers les revues d’architecture lorsque j’étais étudiante à Alger », se souvient Siham Laadjal.

Pour ainsi dire, l’Algérienne n’a pas perdu son temps. Tout en étudiant à Versailles, elle travaille à mi-temps dans un cabinet d’architecture parisien, l’Agence Philippe Prost, titulaire du Grand prix national d’architecture.

Une fois son diplôme d’architecte DPLG en poche, son père lui demande de rentrer en Algérie. Mais le destin en a voulu autrement. Car alors qu’elle réfléchit à son avenir, son employeur lui propose un contrat intéressant.

Elle y reste huit ans, pendant lesquels elle a eu l’occasion de travailler sur « de très beaux projets comme la Monnaie de Paris, le projet de l’école militaire ou la réalisation d’une opération de logements sociaux ».

En 2010, la sempiternelle question se pose à nouveau : rester en France ou partir. Puis de nouveau le destin. JTB architecture souhaite l’embaucher. Elle accepte. « On s’est dit que c’est pour une petite période, le temps d’un concours. Et la collaboration a duré presque 10 ans », jusqu’en 2020, lorsque Siham Laadjal décide de fonder Koko Architecture avec sa collègue et amie Lucie Garnier, une Française.

Siham a aussi obtenu sa naturalisation mais elle est restée profondément attachée à l’Algérie où elle se rend régulièrement, parfois accompagnée de son associée. Aujourd’hui, son père n’est plus là pour l’accueillir et être fier de tout ce qu’elle a pu réaliser. Mais elle n’a pas oublié la promesse qu’elle lui a faite. Celle de « réaliser un jour de beaux bâtiments en Algérie ».

Siham Laadjal fait partie de ces nouvelles figures de la diaspora algérienne en France. Des diplômés de grandes écoles, des cadres et dirigeants dans de grandes entreprises françaises et des chefs d’entreprise. Elle symbolise aussi ce que l’Algérie et la France peuvent faire ensemble.

Présente au lancement du Conseil mondial de la diaspora algérienne vendredi 8 mars à Paris, Siham Laadjal veut, comme de nombreux Algériens de l’étranger, apporter son aide et son savoir-faire pour le développement de l’Algérie.

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