Politique

Tebboune en Turquie : entre pragmatisme et gestes symboliques

Les relations entre l’Algérie et la Turquie sont au beau fixe, c’est le moins que l’on puisse dire. La visite que Abdelmadjid Tebboune a effectuée au pays de Reçep Tayyip Erdogan du 15 au 17 mai vient consacrer plusieurs années d’entente politique et de coopération économique dynamique.

Il s’agit de l’un des rares déplacements à l’étranger du président Tebboune, tout comme M. Erdogan est l’un des tout premiers dirigeants étrangers à se rendre en Algérie depuis l’élection présidentielle de 2019.

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Toute la symbolique de l’excellence de la relations algéro-turque actuelle est là. Une relation qui rappelle que le pragmatisme économique peut servir de locomotive pour le reste.

Les deux pays ont signé en 2006 un accord de partenariat qui s’est vite traduit par le renforcement des échanges et des investissements turcs en Algérie.

Les chiffres ont été répétés à l’envi pendant les trois jours qu’a duré la visite de Tebboune : la Turquie est aujourd’hui le premier investisseur étranger en Algérie avec environ 5 milliards de dollars, plus de 4 milliards d’échanges commerciaux et 1400 entreprises turques sont présentes en Algérie.

Les deux pays ne comptent pas en rester là et leurs ambitions, exprimées au cours de la visite, sont à la hauteur de leur entente. En conférence de presse conjointe, les deux présidents ont fixé lundi l’objectif de dépasser 10 milliards de dollars d’échanges.

Pour aller encore de l’avant, de nouveaux accords ont été signés au cours de cette visite présidentielle et touchent les secteurs de l’énergie, des mines, des finances, du commerce, de l’industrie, de l’information, des travaux publics, de la pêche, des sciences et technologies, des micro-entreprises, des œuvres sociales, de la formation professionnelle, de la culture, de l’éducation, de l’environnement et la lutte contre le crime organisé transfrontalier.

La coopération touchera aussi le secteur sensible de la défense et des industries militaires, ont annoncé les deux chefs d’État. Des pourparlers sont déjà engagés par des entreprises turques avec la partie algérienne.

Mémoire apaisée

L’entente diplomatique sur de nombreux dossiers de la géostratégie internationale, comme la crise libyenne ou la situation au Sahel, a suivi ce dynamisme de la coopération économique.

Pendant la visite qui vient de s’achever, les deux présidents algérien et turc n’ont pas eu besoin de trop s’attarder sur ces questions tant l’harmonie des deux pays n’a jamais été démentie ces dernières années.

[Crédits : présidence de la République]


Autre signe de la relation apaisée qu’entretiennent les deux nations, la « mémoire » ne s’est pas invitée dans et autour de la visite, en dépit de plus de trois siècles de présence ottomane en Algérie entre le 16e et le 19e siècles.

Erdogan s’est aussi gardé d’évoquer la colonisation française, dont il rappelait régulièrement par le passé les crimes en Algérie. Le souci est peut-être de ne pas froisser les relations algéro-françaises qui commencent à se réchauffer après plusieurs mois de brouille.

Même le président Tebboune a presque éludé la question, se contentant, dans son discours à l’université d’Istanbul, de rappeler que les Algériens ont été maintenus dans l’ignorance par le colonialisme.

Derrière la forte coopération économique, l’entente politique et la relation apaisée entre l’Algérie et la Turquie se trouve avant tout un respect mutuel entre les deux nations pour leurs fondements respectifs.

Symboliquement, Abdelmadjid Tebboune s’est recueilli à Ankara devant le tombeau de Mustapha Kemal Atatürk et rendu un vibrant hommage au fondateur de la Turquie moderne. Tout aussi symboliquement, les Turcs ont remis à leur hôte algérien un document et un portrait de l’Emir Abdelkader, considéré comme le fondateur de l’Etat algérien moderne.

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