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Drame des Rohingyas : l’inexplicable silence international

Drame des Rohingyas : l’inexplicable silence international

Capture d'écran / Youtube

Les autorités de Birmanie, pays à majorité bouddhiste, mènent depuis la fin août 2017 ce qui ressemble à une purification ethnique contre la minorité musulmane des Rohingyas. Un massacre qui, curieusement, est entouré d’un inexplicable silence au niveau international.

Seules les ONG de défense des droits de l’Homme ou des pays comme la Turquie, la Malaisie, la Tunisie et l’Indonésie ont lancé des alertes pour attirer l’attention du monde sur le drame qui se déroule depuis plusieurs jours dans l’État de l’Arakan (Rakhine) à l’ouest de la Birmanie.

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Les militaires se déchaînent sur la population civile après les attaques du 25 août dernier contre des postes de police attribuées à l’ARSA, l’Arakan Rohingya Salvation Army (la persécution contre les Rohingyas remonte déjà à plusieurs années).

L’armée ne fait aucune distinction entre femmes, enfants ou personnes âgées. Elle tue, viole, incendie les villages et recourt aux exécutions extrajudiciaires, comme à l’époque des Khmers Rouges au Cambodge dans les années 1970.

Selon Amnesty International, les autorités empêchent l’arrivée de l’aide humanitaire dans les villages où habitent les Rohinygas. « Les restrictions imposées par les autorités du Myanmar à l’aide internationale dans l’État d’Arakan mettent en péril la vie de dizaines de milliers de personnes, dans une région où la population majoritairement rohingya subit déjà de terribles atteintes aux droits humains dans le cadre d’une campagne militaire disproportionnée », a soutenu Amnesty International.

Selon l’ONG, sans nourriture et sans eau, la vie de milliers de personnes est en danger.  « Les musulmans sont affamés chez eux. Les marchés sont fermés et les gens ne peuvent pas sortir de leurs villages, sauf pour fuir. Les autorités recourent à l’intimidation, en utilisant la nourriture et l’eau comme des armes », a rapporté Amnesty citant un responsable humanitaire.

Human Rights Watch a, pour sa part, accusé le régime de Rangoon d’appliquer la stratégie de la terre brûlée pour pousser les Rohingyas au départ. En douze jours, plus de 125.000 Rohinygas ont quitté leur pays pour se réfugier au Bangladesh voisin où ils sont déjà plus de 400.000 personnes de cette minorité à vivre, dans des conditions inhumaines, dans des camps pour réfugiés.

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L’ONU fait preuve d’une incroyable passivité face à un drame qui rappelle l’inaction internationale lors des massacres au Rwanda en 1994. Du bout des lèvres, le Haut-Commissaire aux droits de l’homme de l’ONU, Zeid Raad Al Hussein, a appelé l’armée birmane à « la retenue » !

Retirer le Nobel de la paix à Aung San Suu Kyi

L’attitude étonnante de Aung San Suu Kyi, figure historique de l’opposition birmane et actuelle chef du gouvernement (arrivée au pouvoir en 2016), face à la tragédie des Rohinygas a provoqué de la colère dans le monde.

L’Afghane Malala Yousafzai, prix Nobel de la paix, a interpellé directement la responsable birmane.  « Chaque fois que je regarde les informations, j’ai le cœur brisé face aux souffrances des musulmans Rohingyas de Birmanie. Ces dernières années, je n’ai pas cessé de condamner le traitement honteux dont ils font l’objet. J’attends toujours de ma collègue prix Nobel Aung San Suu Kyi qu’elle en fasse de même », a écrit avec courage Malala Yousafzai sur son compte Twitter alors que la plupart des intellectuels se taisent en Europe, en Amérique et dans le monde musulman.

Des appels ont été lancés pour retirer le Prix Nobel de la paix à Aung San Suu Kyi. Au lieu de dénoncer les crimes des militaires birmans, elle a parlé, sans convaincre, de « désinformation ». Son gouvernement empêche les médias birmans ou étrangers de traiter de la situation dans l’Arkan. Les médias sont obligés de qualifier à chaque fois les Rohingyas de « terroristes ».

La Turquie, l’Indonésie et le Pakistan ont engagé des actions diplomatiques pour faire pression sur le régime birman et pour demander l’ouverture d’enquêtes sur les exactions contre les Rohingyas.

Quelle est donc la position de l’Algérie sur ce drame humain ? Silence à Alger. Silence à Bruxelles aussi, siège de l’Union européenne (UE), grande donneuse de leçons sur les droits humains.

En juillet 2016, le Parlement européen a appelé la Birmanie à agir pour mettre un terme « aux persécutions systématiques et à la répression brutale » de la minorité Rohinygas. C’est tout !

Washington, qui distribue les « bons points » sur les droits de l’Homme et les libertés dans le monde, fait semblant de ne rien voir de ce qui se passe en Birmanie.

Et si les Rohingyas n’étaient pas musulmans ? La position du « monde civilisé » aurait-elle été différente ? Existe-t-il de « bonnes » et de « mauvaises » victimes dans l’échelle de la dénonciation mondiale ? Ou le massacre des Rohinygas est-il un simple fait-divers qui ne peut pas égaler « l’importance » des dégâts que peut causer l’ouragan Irma ?

Le calvaire des Rohingyas, l’une des minorités les plus persécutée au monde n’ayant même pas droit à la citoyenneté birmane, prouve que ce qui est appelé « la communauté internationale » agit selon la règle de deux poids, deux mesures, selon les intérêts géostratégiques et économiques et l’appartenance religieuse.

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